Des formations en droit des outre-mer ont existé dans la plupart des facultés de droit après la seconde guerre mondiale et jusque dans les années 1980.
En 1954, le cours de droit d’outre-mer devient même une matière obligatoire en quatrième année de droit public et une matière à option en quatrième année de droit privé. Il s’agissait généralement d’enseignements de « droit de l’outre-mer et de la coopération » prenant appui notamment sur le manuel de Louis Rolland et Pierre Lampué, Droit d’outre-mer et de la coopération, dont la dernière édition paraît chez Dalloz en 1969, celui de François Luchaire, également intitulé Droit d’outre-mer et de la coopération publié chez Thémis en 1966, ou encore le Droit d’outre-mer de Pierre-François Gonidec paru chez Montchrestien en 1959.
Ces ouvrages étaient généralement issus des cours de législation coloniale qui ont commencé à être dispensés à la fin du XIXème siècle, soit dans les facultés de droit, soit plus tard à l’École Nationale de la France d’Outre Mer (E.N.F.O.M.) où étaient formés les administrateurs coloniaux (Sur l’ensemble de la question, le lecteur intéressé, peut se reporter notamment à l’article de Philippe Lechat, « Regards sur le droit d’outre-mer », Revue juridique polynésienne, n°1, 1994, à celui de Florence Renucci sur « La « décolonisation doctrinale » ou la naissance du droit d’outre-mer (1946-début des années 1960) », Revue d’histoire des sciences humaines, n°24, 2011, à celui de Dominique Custos, « Le droit d’outre-mer : mort, résurrection ou transfiguration? », Mélanges Georges Dupuis, L.G.D.J., 1997, ou encore de manière plus générale à la magistrale thèse d’histoire de Pierre Singaravelou, Professer l’Empire : l’enseignement des « sciences coloniales » en France sous la Troisième République, Paris I, 2007).
Cette transition du droit colonial vers le droit d’outre-mer qui a accompagné la transformation, puis la disparition progressive de l’Empire colonial français, n’aura duré en réalité que quelques années puisque ces enseignements ont rapidement disparu de la carte des formations dans les universités ou les grandes écoles. Plusieurs causes peuvent expliquer cette disparition : l’identité normative prônée pour les D.O.M. à compter de la loi de départementalisation du 19 mars 1946 et donc une forme d’alignement sur le droit commun national bien sûr, mais aussi sans doute un certain désintérêt, voire un mépris, pour ce « droit des marges ».
Cependant, aujourd’hui, par un curieux mouvement de balancier de l’histoire, l’enseignement du droit des outre-mer connaît un véritable regain.
Plusieurs manuels spécialisés ont été publiés récemment. On peut notamment citer ceux de Jean-Philippe Thiellay, de Jean-Yves Faberon et Jacques Ziller, ou encore, il y a peu, celui de Jean-François Auby (cf l’onglet « Ressources documentaires »).
Le législateur lui-même est intervenu afin de promouvoir cet enseignement dans les grandes écoles. En effet, l’article 51 de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer prévoit que : « L’Etat et les collectivités territoriales d’outre-mer encouragent et favorisent la création d’une chaire d’excellence consacrée à l’outre-mer dans une grande école ».
Ce climat favorable dénote la prise de conscience par la doctrine, mais aussi par les pouvoirs publics et les responsables politiques, d’une lacune dans la formation juridique de ceux et celles qui seront appelés demain à devenir fonctionnaires territoriaux, agents de l’État, magistrats, avocats, universitaires, collaborateurs parlementaires, etc.
De fait, on peut relever que plusieurs cours ou séminaires de droit des outre-mer ont été créés ces dernières années. Nous avons tenté d’en dresser ci-après un panorama, sans doute non exhaustif (les lecteurs sont d’ailleurs invités, s’ils constataient un oubli ou une erreur, à bien vouloir les signaler en adressant un mail à : lajdom.contact@gmail.com ). Néanmoins, comme on peut le constater, cette liste est encore succincte. Précisément, l’un des buts de L’AJDOM est de militer pour la reconnaissance du droit des outre-mer comme une discipline spécifique et autonome et de promouvoir sa diffusion dans les facultés de droit et les grandes écoles.
Enseignement supérieur public :
Universités
- Université des Antilles, Faculté de droit et d’économie de la Martinique, Master droit public, parcours droit de la Caraïbe : http://formation.univ-antilles.fr/diplome/3076
- Université de Bordeaux, Faculté de droit et de science politique, « Droit des outre-mer », Master droit public : https://www.u-bordeaux.fr/formation/2018/PRMA_119/droit-public
- Université de La Réunion, Faculté de droit d’économie et de gestion, « Droit des collectivités ultra-marines », « Systèmes juridiques de l’Océan indien », Master droit public : http://formation.univ-reunion.fr/fr/formations/droit-economie-gestion-DEG/master-lmd-XB/master-droit-public-program-gd5pu-151.html
- Université de Nouvelle-Calédonie, Département de droit, Licence en droit, « Institutions calédoniennes » ; Master de de droit local, « Droit des collectivités de la Nouvelle-Calédonie » et « Droit des entreprises en Nouvelle-Calédonie » : https://unc.nc/formations/master-droit/
- Université Paris 1-Panthéon-Sorbonne, Département de droit public, « Droit des collectivités d’outre-mer à statut particulier », Master droit et gestion financière des collectivités publiques : http://www.pantheonsorbonne.fr/ws/ws.php?_cmd=getFormation&_oid=UP1-PROG47758&_redirect=voir_fiche_diplome&_lang=fr-FR
- Université de Polynésie française, Faculté de droit, d’économie et de gestion, « Droit des institutions locales », « Droit financier local », « Droit des fonctions publiques de la Polynésie », « Droit foncier de la Polynésie », Master droit public, parcours collectivités territoriales : http://www.upf.pf/fr/content/master-droit-public-parcours-droit-des-collectivit%C3%A9s-territoriales
Grandes écoles
- Sciences-Po Paris : De manière réellement innovante, création en avril 2021 d’une « Chaire outre-mer » portée par le CEVIPOF et son directeur, M. Martial Foucault, à l’occasion des activités de laquelle des enseignements, colloques, séminaires, formations exécutives, etc., en droit des outre-mer pourront être délivrés : https://www.chaire-outremer.com/
- Sciences-Po Bordeaux : Néant. Néanmoins, quelques éléments de sensibilisation à la problématique à travers la filière intégrée France-Caraïbes (Antilles et Jamaïque) : http://www.sciencespobordeaux.fr/fr/formation/diplome-d-institut-d-etudes-politiques-UX/doubles-diplomes-internationaux-cycle4/filiere-integree-france-caraibes-antilles-jamaique-fifca-program-programme-france-caraibes-antilles-jamaique-pfc.html
- E.N.A. : Néant. Pas de formation propre aux spécificités du droit des outre-mer. Néanmoins, peut être abordé de manière incidente au cours des conférences de droit et légistique. Opportunité de la création d’un module de « sensibilisation » des élèves à ce sujet : https://www.ena.fr
- E.N.M. : Formation initiale : enseignements spécifiques dédiés aux prises de fonction outre-mer.Formation continue : quatre jours de formation continue par an sur le thème : « Être magistrat outre-mer », portant davantage sur l’installation, l’affectation, sur les particularismes de la pratique professionnelle ou de la déontologie outre-mer, que sur le droit institutionnel ou substantiel des outre-mer : https://www.enm.justice.fr
Enseignement supérieur privé :
En raison d’une carence dans l’enseignement supérieur public, l’enseignement supérieur privé prend le relais. Ainsi, l’Institut libre des relations internationales (ILERI) propose depuis 2018 un diplôme : « MPI Coopération Internationale des Outre-mer et Environnement » : http://www.ileri.fr/formation/bac5-relations-internationales/mpi-cooperation-internationale-outre-mer-environnement/